BRAHMACHARYA
La Maîtry Upanishad datant probablement de l'époque de Bouddha
dit :
" ô Seigneur, dans ce corps insubstantiel et puant, magna d'os, de
peau, de muscles, de moelle, de chair, de sperme, de sang, de mucus, de larmes
d'excréments, d'urine, de fiel, à quoi bon la satisfaction du
désir ? Dans ce corps en proie au désir, à la colère,
à la convoitise, à la jalousie, astreint à la séparation
d'avec ce qu'on aime, à l'union à ce que l'on n'aime pas, à
la faim, à la soif, à la vieillesse, à la mort, à
la maladie, à la peine et aux autres soucis, à quoi bon la satisfaction
des désirs ? "
A cette vision morbide, quelque peu réaliste, s'opposera d'autres visions
plus sublimées, dont le tantrisme.
Les sages se sont rendus compte que le désir sexuel et la sexualité
sous-tendait toute la vie des hommes et des femmes. L'homme et la femme manifestent,
par leur opposition ou leur complémentarité, les données
et les attitudes d'un double principe nommé mâle et femelle.
L'hindouisme ne connaît pas le mythe du judaïsme de la création.
Brahman est un " Dieu " ou un concept relativement neutre et la création
devient dans le tantrisme un acte créatif dû au Désir :
" le désir fut la première semence de l'Esprit ". Et
cette création est sans cesse, et infinie.
Cette création amène la séparation : d'une part, l'essence
ou Brahman et d'autre part, la manifestation, émanation du principe.
La manifestation devient MAYA, à la fois illusion et magie, qui se transforme
éternellement. Plusieurs versions existent de cette création et
certains processus créatifs ont personnalisé les différents
éléments en les rapportant aux relations unissant l'homme et la
femme.
Le culte de la Mère (présent partout à la surface de la
terre) ou encore énergie de l'univers prit une grande importance dans
l'hindouisme. Chaque Dieu se trouve accompagné de sa SHAKTI qui est son
aspect féminin. De nombreuses écoles vont utiliser le dualisme
ou les oppositions, afin de rechercher le principe unique qui sous-tend toute
la création, en utilisant les aspects féminin et masculin, le
dépassement du dualisme vers l'unicité.
Ce symbolisme mâle et femelle fut porté à son paroxysme
dans le tantrisme, lié à d'anciennes techniques ou procédés,
comme le YOGA, ou des systèmes comme le bouddhisme, le jaïnisme,
le sivaïsme ou des points de vue comme le Samkhya. Il existerait alors
entre autres un tantrisme ancien amalgamé avec des méthodes, un
tantrisme yogique et un bouddhisme tantrique, etc.
Les voies d'approche étant sensiblement différentes, il conviendra
de relever les principes communs.
Le tantrisme est d'abord considéré comme l'union sublimée
des éléments mâle et femelle. Le SHAKTISME est aussi un
terme utilisé, ou culte de la Déesse, considérée
comme énergie provenant de Brahman. Le Véda et la Bhagavad Gîta
ne citent pas le tantrisme en tant que méthode, mais le tantrisme utilise
leurs données multiples. Les tantras néanmoins existent depuis
très longtemps, mais peu de choses ont transpiré des cérémonies
secrètes, car un second principe apparaît dans le tantrisme : la
notion du secret. Seul est retenu bien souvent l'aspect extérieur de
pratiques sexuelles, amplifié par la méconnaissance des Européens,
scandalisés par une vue simpliste du sexe réprimé, imbus
de leurs valeurs moralistes. Le tantrisme deviendra synonyme d'anciennes orgies,
de pratiques hors normes, ce qui n'est certainement pas le cas.
L'aspect de la sexualité, comme force vitale ou principe de vie, sera
développé dans le tantrisme tout particulièrement et ce
depuis très longtemps. L'acte sexuel en même temps fut sacralisé,
pendant que les organes sexuels vont prendre une importance dans l'hindouisme,
par retour à la nature, où le monde est l'expression du divin
ou des énergies nombreuses.
Le principe mâle sera représenté par le Dieu SHIVA, ayant
pour emblème le croissant de lune et le linga ou phallus, retrouvés
dans de nombreux temples et qui sera adoré comme tel. Cette adoration
s'adresse en fait à la divinité et va se dessiner aussi dans la
statuaire des temples. Le temple de KHAJURARO est un exemple de temple tantrique
où les murs d'enceinte extérieurs sont dédiés à
la vie quotidienne et aux asanas tantriques. Les murs du temple extérieur
sont censés reproduire l'acte fondamental de la création sous
toutes ses formes, d'où une profusion de couples enlacés. Partout
des courbes et des formes expriment une vie intense qui est la manifestation
variée et prolifique de la vie elle-même, dans sa puissance de
création.
En contrepartie d'une vision prônant le détachement complet, comme
celle du jaïnisme et certaines voies bouddhistes, existent des visions
intégrées dans les forces naturelles. Le tantrisme admet comme
premier principe une vision et une évolution, basées sur la sexualité
et les forces vitales. Alors que le jaïnisme combat la vie jusqu'à
supprimer parfois la vie même de l'adepte, que le bouddhisme déclare
que la cause de la souffrance est le désir et que tout est souffrance,
le tantrisme lui admet un mode de pensée, des attitudes qui, à
partir d'éléments de base amoureux, passionnels, extatiques, incluent
l'adepte dans le courant même de la vie. Le bouddhisme tantrique admettra
cependant aussi que l'adepte doit participer au courant de la création,
vers l'état de bouddha en promouvant la compassion.
Pour le tantrisme, la vie devient l'élément de la jouissance qui
va se porter au paroxysme dans une conception la plus large possible. Ainsi
les tantrikas utilisent les énergies internes et plus particulièrement
celles de l'amour, d'une sexualité portée vers l'extase amoureuse.
Le principe fondamental est que l'activité amoureuse doit rejoindre l'activité
de la divinité dans son principe femelle, ou SHAKTI. La déesse
est le principe créateur ou géniteur, fécondée par
le principe mâle qui s'unit à elle. Il y a un jeu cosmique basé
sur le plaisir des Dieux : c'est le jeu ou la danse de SHIVA, principe de la
création du monde. Au niveau divin, cette création se fait dans
la joie, dans la béatitude et la félicité éternelles.
L'adepte tend à sublimer le plaisir afin de rejoindre cette même
activité cosmique. S'il réussit dans ses pratiques, il vit en
état de béatitude permanente, en s'identifiant avec la divinité.
Tout le tantrisme va inclure différents aspects de la métaphysique
et de la religion, sans qu'il soit possible de l'assimiler lui-même à
un point de vue ou DARSHANA indiens (au nombre de cinq).
Le tantrisme a une portée théorique et pratique, l'activité
de création se portant précisément sur la création
elle-même dans ses manifestations. Il existe différentes écoles
de tantrisme, différentes dans leurs approches, mais ayant pratiquement
toutes en commun l'idée fondamentale du rapport entre le principe mâle
et le principe femelle, à un niveau cosmique, semblable au jeu de l'époux
et de l'épouse. A ce niveau, l'accouplement divin crée des courants
d'énergie ou DEVATAS. Ces courants peuvent être captés,
puis figurés dans les mandalas ou mantras. En même temps, toute
cette énergie qui existe dans la manifestation existe dans le corps humain,
sous le principe mâle et le principe femelle. Le tantrisme va utiliser
un certain nombre de symboles ou d'images pour traduire ces énergies
qui seront recherchées, seul ou avec un partenaire initié.
Les dévatas qui sont ces énergies, sont les premiers symboles, présentés sous une forme humaine. Ces personnages souvent féminins ont des postures, des attitudes suggestives propres déjà à entraîner l'imagination érotique du contemplateur. En fait, cet aspect extérieur cache l'aspect intérieur où il doit y avoir identification avec le principe même, que veut symboliser les DEVATAS. Il faut une ascèse, une discipline, une Sadhana pour obtenir une identification psychologique de plus en plus profonde avec les courants d'énergie, avec les énergies elles-mêmes. Cette énergie est traduite par deux symboles, celui du feu et celui de la Kundalini entre autres. Ce feu ardent doit porter le pratiquant.
Il existe un feu intérieur dans l'homme qui entretient toutes ses fonctions vitales. Cette énergie peut être développée par des techniques sous la conduite du gourou qui va réveiller ce feu intérieur, le développer, l'amplifier, jusqu'à produire un embrasement vers un progrès spirituel et vers la délivrance finale.
Le second symbole représente la déesse lovée au bas de
la colonne vertébrale, serpent femelle qui va à son tour embraser
le corps dans ses différents chakras, pour se résorber dans une
fusion totale avec l'univers. Il s'agira d'éveiller par des techniques
précises la Kundalini, dans le corps subtil, dont chaque élément
a été recensé par les différentes écoles.
La Kundalini devient la représentation de la SHAKTI divine qui va rejoindre
son époux, SHIVA et qui doit s'unir à lui. Pour Sri Aurobindo,
" le Jiva est le support d'une action partielle individualisée de
la puissance unique ".
Ce corps subtil peut être envisagé par le yogi sous différentes
formes. Il existe des descriptions assez diverses. La plupart du temps, les
courants d'énergie ont été recensés sous la forme
des NADIS dans le corps psychique, semblables à des traînées
lumineuses. Au long du nadi principal, ou SUSHUMNA se trouvent les chakras,
ou centres de forces, assez proches des plexus. Lorsque la kundalinî s'éveille,
elle s'élève dans les chakras en s'accompagnant d'un certain nombre
de phénomènes matériels ou psychiques. Nul n'éveille
un chakra sans obtenir les pouvoirs qui correspondent (télépathie,
claire audience, clairvoyance, etc.). Ces pouvoirs proviennent par naissance,
par l'ingestion de substances préparées et sans poison, ou par
un travail fastidieux.
En éveillant ces forces, l'adepte réveille le serpent, symbole
des énergies latentes. Il utilise la puissance du serpent, ce qui signifie
qu'il prend conscience des énergies internes dans le but d'un progrès
spirituel. Cet éveil se fait directement par la méditation (DHYANA).
Pour le tantrisme, l'éveil de la kundalini, l'activation des centres
psychiques aura pour but la délivrance ou l'état de samadhi ou
de "Jivanmukta", l'être délivré vivant. La particularité
du tantrisme est d'utiliser les forces sexuelles, c'est-à-dire en premier,
la force du désir. Ce désir comme dans la doctrine yogique est
la source de l'activité mentale, tourbillon de pensées confuses
et non dirigées. Le yoga est une mise en ordre de ces pensées
qui seront contrôlées, mais aussi transcendées. L'agitation
mentale doit disparaître, car les pensées envahissent le mental,
conditionnent les attitudes, maintiennent la dispersion, dirigent les actes,
éloignent de la réalité.
La démarche du Tantrika, celui qui pratique le tantrisme peut être
partielle ou complète. L'adepte peut disposer de peu d'éléments
ou au contraire rechercher ces éléments dans une quête spirituelle,
à la recherche d'un ashram ou d'un maître. Il peut ou non pratiquer
des rites, des rituels, des exercices, ou une SADHANA. Souvent il s'affranchit
des rites, non nécessaires à sa pratique.
Le tantrisme en Occident a été reconnu et étudié
par SIR JOHN WOODROFFE qui a écrit sous le pseudonyme d'Arthur Avallon.
Les livres en fait ne traduisent pas la réalité des uvres.
Peu ont été entièrement et fidèlement traduites,
car Avallon, s'adressait à des anglais puritains et des indiens, victimes
des préjugés de castes.
En Orient, le tantrisme apparaît à une époque relativement
récente (si l'on s'en tient aux textes qui dateraient du IVième
siècle de notre ère). L'atharva Veda forme un ensemble de textes
tantriques et on trouve encore dans d'anciens textes des éléments
tantriques. On peut citer des Tantras ou livres hindous, bouddhiques ou jaïns.
En fait, ces textes écrits semblent avoir été repris d'une
tradition plus ancienne et orale, transmis dans les familles ou les groupes
de maîtres à élèves.
On peut citer parmi les textes tantriques les plus courants les textes issus
:
- d'anciens textes, avec le concept de Sanatana-Dharma, base religieuse de l'hindouisme,
concept de permanence et d'éternité.
- du Shivaïsme où Shiva emprunte plusieurs formes.
- des CAKTISANGAMA, dont les termes signifient Cakti puissance ou Grande déesse,
initiées femelles partenaires des Tantrika mâles.
- des KULARNAVA, dont les termes viennent de Kula ou KAULAS, membres initiés
ou par naissance d'un groupe tantrique du Bangale (Kula). Le terme KULADEVETA
signifie divinité de famille, avec le culte de Rama.
- des concepts du MAHANIRVANA, de Maha Grand, Nirvana, libération du
Karma délivrance, état d'être du bouddha.
- des TANTRARAJA, de Tantra et Raja royal qui décrit les utilisations
véritables tantriques des diagrammes cosmiques.
- du bouddhisme tibétain avec des tantras médicaux, astrologiques,
issu du Vajrayana et censés provenir des révélations du
Bouddha.
Texte principal Guhyagarbha-Tantra.
- ainsi que de très nombreux textes actuellement traduits (voir bibliographie
et seconde partie) issus de nombreux courants.
En fait, ce ne sont jamais ces livres ou traités qui donneront la connaissance
du Tantra. Le tantrisme demande un engagement, une ascèse qui amène
parfois une rupture avec la caste dont fait partie l'indien. Les croyances populaires
sont parfois inverses de celles du Tantrika. Ainsi, on peut retenir l'idée
que loin d'être un facteur de développement spirituel, l'utilisation
des énergies sexuelles peuvent être un frein. Certains brahmanes
pour éviter tout gaspillage de cette énergie s'abstiennent de
relations avec leurs épouses. Certaines sectes iront jusqu'à la
castration. La vertu est alors utilisée pour contenir la libido, l'énergie
sexuelle revenant à celui qui la contient. Certaines branches tantriques
ont utilisé cet ascétisme, pendant que d'autres au contraire vont
favoriser et exciter au maximum la libido. Cette différence de vues va
entraîner la différence des méthodes et des approches non
similaires.
L'art et le rituel vont servir d'éléments qui permettront la manipulation
des forces énergétiques. Certaines données ont été
pratiquées depuis des millénaires et qui en font à la fois
une méthode d'exploration de la psyché humaine et une méthode
tournée vers l'extase, la dissolution d'un moi particulier qui rejoint
l'universel. Il y a tout un domaine de connaissances au niveau du corps, de
la psychologie humaine, de l'énergétique des êtres et de
l'univers qui les entoure.
Les cérémonies et les rituels tantriques ne sont pas des moyens
extérieurs, mais se vivent à l'intérieur. Ils expriment
avant tout l'intériorité de l'adepte qui se concentre sur les
éléments qu'il met en jeu. Les images amènent une identification
profonde entre le Tantrika et les éléments qu'elles suggèrent.
Il y a acte magique qui entraîne la manipulation de forces et comme il
s'agit en premier de forces sexuelles, celles ci vont être orientées
vers l'amour, l'amour de la femme tout d'abord, l'amour de la Déesse,
puis un amour de plus en plus transcendant dépassant toute limite vers
l'extase, l'adoration, la contemplation. Les images visibles sont bientôt
dépassées, seules subsisteront les idées de plus en plus
abstraites et difficilement communicables.
Le mantra devient la semence des énergies intérieures, créant sa propre résonance, sur un ton de voix déterminé, sur une prononciation spéciale, au moment donné, précis. Les mots désignant les choses et les objets ou les idées, connaître le son, c'est avoir pouvoir sur les choses. Le mantra donne ce pouvoir et la connaissance. Il est vibration et enclenche des phénomènes de résonance.
Transposé sur un mode visuel, le mantra devient le Yantra ou diagramme
visuel condensant l'idée et les énergies, support de la méditation.
Le corps humain devient lui aussi un Yantra dans l'analyse des lignes de forces
qui sont en lui. Yantra et mantra amènent à dépasser le
plan physique sur lequel ils évoluent pour amener une nouvelle compréhension.
On a dit que la signification exacte des mantras et des YANTRAS est impossible
à concevoir pour un occidental. Si des formules sont écrites,
elles ne seront valables que si elles ont été commentées
ou données par un maître qualifié.
Voici en fait l'exemple du mantra " PRAM ", appelé Prajna-Paramita
Mantra. En fait, il est un résumé des trois mots, ces derniers
font référence aux lignes du PRAJNA Paramita Dharani, qui lui-même
vient des stances du Prajna Paramita Hrdaya sutra. Ce dernier est lui aussi
simplement un résumé d'un texte de 8000 vers du traité
Mahayana Astangama Srika Prajna Paramita. Prononcer ce mantra viendra tardivement
à dire que ce seul mantra résumerait toute la connaissance de
ce dernier texte ! Cette vue incorrecte omet alors le travail réel que
ce mantra impose dans la voie de la connaissance.
Les énergies intérieures vont être développées
à partir de supports. Au lieu d'être dispersées comme d'habitude
dans les différentes fonctions sensorielles, les perceptions mentales,
la sexualité, ces énergies vont être dirigées pour
percevoir la réalité. Le monde est perçu en fonction des
projections que l'homme fait sur lui et le monde qui l'entoure. Les énergies
sont souvent gaspillées. Le Tantrika concentrant ces énergies
va disposer d'un potentiel élevé et, se libérant de l'illusion
d'être, va pouvoir approcher des vérités supérieures
qui illuminent sa conscience, lui donnant à l'intérieur du même
homme une autre dimension. Il ne perd aucune de ses facultés émotives
ou sensuelles. Au contraire, le corps prend sa véritable dimension, en
parfait fonctionnement.
Faire l'amour, valoriser un corps sanctifié, n'est plus un acte du désir
ou créatif, c'est éveiller des actions musculaires, donner la
vie à la déesse, réveiller Kundalini, la déesse
qui s'est endormie après avoir créé. Ce serpent femelle
chante son hymne à partir des lettres du sanscrit et tisse toutes les
formes de l'univers, d'où le mot tantra qui signifie trame.
Les énergies passant de chakra en chakra au long de méditations
amènent des transformations intérieures et des états de
conscience différents, parfois des pouvoirs d'ordre physiques ou mentaux.
En dernier lieu, elles amènent la connaissance et l'intégration,
la libération.
Mais à la fin de cet accomplissement que devient le Tantrika ?
"A sa gauche, il a la femme experte aux arts de l'amour, à sa droite
sa coupe de boisson. Devant lui sa viande de porc cuite avec des piments. Près
de son épaule, une Vina bien accordée avec ses mélodies
". Selon le Kaulavalnirnaya, " lorsqu'il est seul, il est comme fou,
muet ou paralysé. Dans la compagnie des autres, il se tient comme un
homme normal, parfois comme un méchant ; à certaines occasions,
il semble même agir comme un démon, parce qu'il travaille en vue
d'une fin complexe et à très long terme. Détaché
de son corps et immergé dans sa vision, il joue avec ses sens, qui pour
d'autres peuvent être aussi dangereux que des serpents venimeux. Où
que ce soit, qu'il perçoive des fleurs, de la nourriture ou des parfums,
il les offre à la Grande Déesse. Il sait qu'il est complet par
lui-même, qu'il a atteint les bornes de la Chakti et qu'il devient la
béatitude éternelle, l'immortel, l'illimité Soi, libre
de toutes divisions et immuable".
Dès lors, la voie tantrique est une voie ascétique guerrière,
vers la conquête du moi intérieur, de l'homme aimant et aimé,
orienté vers une Réalité supérieure.
Nul ne peut véritablement emprunté ce chemin sans purification
interne et externe, sans guide solide en Inde, sans entrevoir un changement
radical dans la perception des choses et des êtres. Alors seulement, l'homme
véritable peut s'éveiller en lui, fait de connaissances et d'amour.
Georges Courts. Enseignement à l'École de Yoga de l'Est : Cours
de Philosophie Indienne.